Prendre Messi pour lanterne
Plus que jamais, l’Argentin est le leader technique de Barcelone, qui traverse une période un peu trouble
- Publié le 20-10-2018 à 08h00
- Mis à jour le 20-10-2018 à 17h05
Plus que jamais, l’Argentin est le leader technique de Barcelone, qui traverse une période un peu trouble.
41 - 60 - 59 - 91 - 45 - 58 - 52 - 59 - 54 - 40. Qu’est-ce ? Les numéros gagnants du prochain EuroMillions ? Les codes nucléaires de Donald Trump ? Non, il s’agit des stats buts de Lionel Messi sur ces dix dernières années. Et comme on l’a déjà dit aussi souvent qu’il nous a impressionnés, elles dépassent toute logique humaine.
Plus impliqué dans le jeu
Cette saison, Messi affiche déjà le score parfait avec onze buts en autant de rencontres. Et cinq passes décisives. C’est dire s’il est encore et toujours le véritable patron du Barça, dont il a hérité du brassard de capitaine suite au départ d’Andrés Iniesta, parti finir sa carrière en roue libre au Japon. Recasé sur l’aile droite après avoir passé la dernière saison comme attaquant aux côtés de Luis Suárez, le joueur de 31 ans est manifestement plus à l’aise, dans un rôle qui lui offre l’occasion d’être plus dangereux par lui-même ou via les autres.
Cette mainmise sur le jeu du club se sent dans celui de Messi lui-même, et surtout dans ses statistiques. Depuis le début du championnat, l’Argentin porte littéralement son équipe sur ses épaules, tant en alimentant le marquoir que ses partenaires de jeu. En 2018/2019, La Pulga a distribué presque 70 passes par match en moyenne, soit son plus haut total depuis une décennie. Il n’en était qu’à 52,3 l’an passé.
Jamais non plus il n’a délivré autant de passes-clé qu’à l’heure actuelle (3,5). Il est d’ailleurs le plus actif dans ce domaine en Liga. Résultat des courses, Messi tente moins sa chance au but (4,6 fois par match contre 5,5 fois la saison dernière, c’est son plus faible chiffre depuis 2010-2011). Quand on compare cela à sa réussite devant les cages adverses (c’est notamment lui qui a le plus cadré cette saison), on découvre à quel point le quintuple Ballon d’Or marche sur l’eau en ce moment, contrairement à son club, qui piétine en championnat (trois nuls et une défaite lors des quatre dernières journées).
Une Messi-dépendance ?
Le spectre de la fameuse Messi-dépendance, sorte de serpent de mer du foot espagnol, est naturellement de retour, alors que le Barça peine à tenir un rythme digne d’un champion en titre.
"Leo nous donne un avantage indéniable", expliquait Jordi Alba après un nul acquis contre l’Athletic Bilbao, match où Messi était entré en cours de jeu, avant de délivrer un assist à Munir El Haddadi. "Quand il rentre, on crée plus de jeu et d’occasions. La réalité, c’est qu’on est juste meilleur avec lui. On aimerait qu’il soit présent à tous les matches."
"Je pense que nous avons un effectif capable de couvrir son absence", tempérait cependant le latéral gauche dans Marca.
"En plus d’avoir le meilleur joueur du monde, nous ne pouvons pas dépendre de Messi pour tout résoudre. Nous devons nous améliorer", ajoutait Suárez dans la foulée à El Mundo Deportivo.
Malheureusement, en l’absence de Xavi et maintenant d’Iniesta, le rayon d’action de Lionel s’est considérablement élargi, ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle. Car malgré toutes leurs qualités, Ousmane Dembélé n’est pas Neymar et Ivan Rakitic ne sera jamais un maître comme le furent les deux Espagnols. Et quand on sait que Suárez est dans le dur depuis un petit moment maintenant…
En réalité, seuls Philippe Coutinho et Sergio Busquets un cran plus bas semblent émarger au top niveau, celui qui avait permis au Barça de dominer la planète foot à la fin des années 2000. Aujourd’hui, on a un peu l’impression que les Blaugranas ne parviennent plus à attirer de véritables joueurs du top (Antoine Griezmann, par exemple), tout en s’en remettant à un trait de génie de Messi.
La fin du modèle blaugrana
Celui-ci est donc plus isolé que lors des dernières saisons. Et le début d’exercice des Catalans met en lumière la nécessité de disposer d’un Messi en forme pour prester et reconquérir la suprématie européenne. Pour le moment, ce plan un peu basique fonctionne cahin-caha.
"Il transforme quelque chose d’extraordinaire en une routine", expliquait le coach Ernesto Valverde après le triplé de Leo contre le PSV.
Comme quoi, celle-ci a parfois du bon, mais sera-ce suffisant à plus long terme ? On est tenté de répondre non.
Le constat s’impose : Valverde va devoir trouver autre chose. Oui, Lionel Messi n’en finit plus de soutirer des frissons de plaisir au cours de ces dernières semaines (triplé face au PSV, match énorme à Tottenham, coup franc ingénieux contre Alavés). Oui, c’est bien lui le patron de la Liga en ce moment. Mais il devient difficile, même pour lui, de masquer les limites actuelles d’une institution comme le Barça, qui ne pourra pas miser indéfiniment sur une illumination argentine pour atteindre ses objectifs. Sous peine de voir le bel idéal catalan, basé sur le collectif et la circulation de balle, définitivement sombrer au profit d’un seul homme providentiel, mais pas éternel.